Retour vers le futur

« Mais pour qui prenez-vous cet homme ? Dieu ? » Si le Colonel Zaysen, du fonds de sa geôle afghane, croit sincèrement que le père de Jésus-Christ a pris les traits – et la coiffure – de John Rambo pour apparaître sur terre, on lui conseille gentiment de prendre un aller-simple, et non-remboursable, pour l’enfer. Johnny la gâchette n’est pas Dieu mais profite de ce retour à l’écran dans « Rambo 3 » pour faire tout comme.

Un Dieu punisseur, tout d’abord, dans les bas-fonds thaïlandais. Plus comique que Topper Harley, et c’est un comble, Johnny noue son bandeau, lace ses poings et s’en va corriger le patineur artistique musculeux qui souhaitent lui mettre la tête au carré. L’ancien du Vietnam joue la carte combattant de rue « pour se faire un peu d’argent »… Et ça marche, même si l’employeur de ces messieurs semble plus enclin à provoquer les accidents du travail qu’à les couvrir.

Une simple passade, cette bagarre, car en réalité, le Dieu de l’Arizona est fait d’amour et de paix. Couvreur, maçon, ébéniste mais sûrement pas coiffeur, John mûri sa réflexion chez les Bouddhistes du coin au point de virer mormon, la polygamie en moins. La réponse est non pour le Colonel Trautman, venu accompagné d’un bureaucrate en manque, lui, de cheveux, afin de sortir la sulfateuse de son étui monastique. Non Colonel, la machine de guerre n’ira pas dégainer dans les champs afghans investit de grands méchants Rouges.

Chose promise, chose due, Trautman saute dans le premier cachot en partance pour la forteresse désertique du Colonel Zaysen et son délicieux accent sibérique, envoyé spécial de Moscou accroc aux hélicos en manque d’un joli bon de sortie. John remet le couvert, et surtout le couteau, pour devenir le Dieu de compassion. Pauvres petits Afghans, menés par Omar Sharif Massoud, obligés de remplacer leur ballon Nike Aero III par un mouton crevé et les cages à filets maillés par des cercles tracés sur le sol. Et puisque Johnny en a ras la moumoute des massacres gratos, le prochain, promis, il est pour lui.

Dieu se transforme en feu pour la dernière demi-heure, à l’assaut de la forteresse. On retiendra, dans le rayon des anachronismes charmants, l’arc lanceur de missiles. D’autres se souviendront, dans la section pansement de fortune, de l’opération au napalm à torse ouvert. Au final, si les missiles sont « dans ton cul » et si l’« on fonçe ! » lorsqu’ils sont des milliers, alors le crépuscule du Soviet Suprême se déroule inévitablement comme Dieu le veut. En bonne baston. Au détail près que celle-ci est réellement d’envergure : qui aurait deviné qu’un char d’assaut, c’est méchamment plus puissant qu’un ridicule hélicoptère de combat ? Dieu, évidemment.

Finissons dans un sourire avec la touchante dédicace finale d’un réalisateur visionnaire, véritable retour vers le futur : « Ce film est dédié aux courageux combattants afghans. » Que les G.I. se rassurent, John a déjà débroussaillé le terrain. Parole du Seigneur.